TRAITEMENTS de POTABILISATION

Introduction.

Ce chapitre ne donnera qu'un aperçu des traitements permettant d'obtenir une eau potable à partir d'une eau brute : eau d'origine souterraine ou de surface.

Les procédés seront évoqués dans leurs grandes lignes, en conformité avec la garantie de confidentialité des procédés brevetés ou non par des sociétés.

 Certains étant rentrés dans le domaine public (livres, brochures, articles, web) pourront être plus détaillés.

 Les schémas ne pourront être que des schémas de "principe".

Nota : au niveau des systèmes et du matériel, ce chapitre est loin d'être exhaustif...








Généralités.
TYPES DE TRAITEMENT
Les analyses préalables au choix d'un traitement permettront de déterminer les paramètres qui ne répondent pas aux normes de potabilité.
La connaissance du contexte général de la ressource devra de plus être pris en compte pour prévoir toutes les possibilités d'évolution naturelle ou accidentelle.
II en résulte un choix de traitement mettant en oeuvre des opérations unitaires. Il ne sera pas question ici d'évoquer toutes les combinaisons possibles.

FILIÈRE COMPLÈTE DE TRAITEMENT
Le traitement à appliquer aux eaux destinées à l'alimentation humaine consiste dans la majorité des cas à les débarrasser de toutes les matières en suspension et colloïdales qu'elles contiennent ainsi que de certaines substances dissoutes.
Pour atteindre ce but, il est généralement nécessaire de combiner plusieurs opérations élémentaires mettant en oeuvre des phénomènes physiques, chimiques et biologiques.
Par ailleurs, il convient parfois de corriger certaines caractéristiques de l'eau résultant des modifications apportées par les traitements ou préexistantes.




La chaîne ou filière de traitement la plus complète comportera:
Prétraitement :

Clarification :

Au cours de l'étape de clarification des eaux brutes, les matières en suspensions et colloïdes, principales responsables de la turbidité, sont extraites.
Dans sa forme complète, le processus de clarification fait appel aux procédés de séparation liquide-solide : décantation et filtration, qui seront précédés, pour les particules les plus fines essentiellement les colloïdes, de traitement de précipitation et de croissance de ces particules : la coagulation, floculation.
De type physico-chimique, ces deux procédés ont pour but de créer avec les colloïdes, des agrégats suffisamment lourds pour qu'ils puissent être séparés du liquide par simple décantation.
En fait, la coagulation-floculation-décantation introduite depuis quelques décennies, revêt une très grande importance :

• 90% au moins des matières en suspension sont extraits à ce niveau du traitement.

• Une coagulation incomplète des matières colloïdales contenues dans l'eau se répercutent d'une manière néfaste sur toutes les étapes suivantes du traitement ; des particules colloïdales ne sont en effet pas retenues sur les filtres, elles gênent alors considérablement la stérilisation et nuisent enfin aux caractères organoleptiques de l'eau (couleur et turbidité notamment).

• Une décantation insuffisante peut conduire à un colmatage rapide des filtres, limitant ainsi considérablement la quantité d'eau produite entre deux lavages.


Une grande partie des micropolluants contenus dans l'eau sont en fait absorbés sur les particules colloïdales. L'élimination des colloïdes conduit donc à l'élimination d'une partie des micropolluants.
La coagulation de ces particules s'accompagne en outre d'un effet complémentaires d'adsorption des micropolluants dissous d'origine organique, tels que les pesticides, ou minérale tels que les métaux lourds par exemple.
II faut noter qu'exceptionnellement, si la turbidité de l'eau brute est faible (au-dessous d'environ 10 NTU) ainsi que la quantité de matières organiques, la phase de décantation peut être supprimée et l'eau brute, additionnée de réactif coagulant, directement admise sur les filtres mono-couches ou éventuellement multi-couches.

Par ailleurs, il existe, en sens inverse, une limite supérieure de la teneur en matières en suspension, variable suivant le modèle de décanteurs, et au-delà de laquelle il est indispensable de prévoir en amont du décanteur un étage de débourbage ou de dessablage (suivant la taille des particules à éliminer).


suite : < voir Traitements physico-chimiques >















TRAITEMENT D'ÉQUILIBRE. 

Le but est d'éliminer le gaz carbonique (CO2) agressif* des eaux, et d'augmenter si nécessaire l'alcalinité (TAC) et/ou la dureté (TH) de ces eaux dites "agressives".
Trois types de traitement sont envisageables :

*Rappel : le CO2 agressif (vis à vis des carbonates) correspond à la fraction du CO2 libre dissous dans l'eau, en excès par rapport aux ions carbonate/bicarbonate [CO3]/[HCO3], et le CO2 qui est en équilbre de liaison avec ces ions (CO2 dit équilibrant).
(voir éventuellement > cette page sur les équilibres).

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Traitement par aération (élimination du gaz carbonique CO2).
Procédé physique, utilisé uniquement si le CO2 est élevée et pour lequel les quantités de réactifs neutralisants seraient prohibitives.
Techniques possibles :

>>> raccourci vers les méthodes de traitement par aération (préoxydation physicochimique).


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Traitement par neutralisation.
Procédé chimique, qui permet l'élimination du CO2 agressif par réaction de neutralisation avec un réactif basique (xOH),
Formule simplifié principale : CO2 + xOH- >>> x[HCO3-]
NB : pas d'action sur la dureté calcique (le calcium est inchangé)..

Remarque : la neutralisation si elle se veut complète, ne se poursuit pas jusqu'à la disparition complète de l'acide carbonique [CO2, H2O] contenue dans l'eau : l'arrêt de l'action neutralisante est à l'équilibre de saturation du carbonate de calcium [CaCO3] de l'eau, ou équilbre calco-carbonique. Si l'on continue à ajouter du réactif, il se produira alors un adoucissement de l'eau par précipitation du CaCO3 car celui-ci, en excès, ne peut rester solubilisé et donc se dépose (dans les conditions de concentration atteintes). A ce point, le CO2 résiduel est dit équilibrant, et n'est donc plus considéré comme du CO2 agressif.

Principales techniques possibles (formules) :

(cliquez sur le nom du réactif pour obtenir plus de renseignements)

Remarques :
- en ce qui concerne la fltration sur calcaire, l'action de neutralisation est relativement lente (par rapport à l'injection de réactifs en solutions), et par ailleurs diminue en efficacité au fur et à mesure de la diminution de la teneur en CO2; il est donc nécessaire de prévoir des filtres importants,
(voir donc aussi les programmes de dimensionnements Neutral et Neutral-F > lien interne).
- Circulaire DG 5/VS 4 n° 2000-166 du 28 mars 2000 relative aux produits de procédés de traitement des eaux destinées à la consommation humaine.

Doses de produits en mg (purs 100%) pour 1 mg de CO2 agressif neutralisé (en mg/mg ou g/m3) :

Réactif >
chaux (Ca[OH]2)
soude (NaOH)
carbonate de sodium (Na2CO3)
calcaire (CaCO3)
Dose
0,84
0,91
2,41
2,273

Augmentation de l'alcalinité (TAC), et de la dureté totale (TH), selon le réactif employé (en °F par mg de CO2 éliminé) :

Réactif >
Ca(OH)2
NaOH
Na2CO3
CaCO3
TAC, °F
0,1136
0,1136
0,2273
0,2273
TH, °F
0,1136
0
0
0,2273

Type de produits utilisables en filtration neutralisante :


Caractéristiques de certains produits utilisables :


Cas particulier :
Neutralisation au bicarbonate de sodium,

NaHCO3 + CO2 + H2O >>> 2 NaHCO3
Dans ce cas il y a une constance de la teneur en CO2 libre de l'eau : transformation du CO2 agressif en CO2 équilibrant, et formation de NaHCO3, donc augmentation du TAC (on peut aller jusqu'à l'équilibre de saturation au CaCO3).

Dose de produit en mg (purs 100%) pour 1 mg de CO2 agressif "transformé" (en mg/mg ou g/m3) :

Réactif >
Bicarbonate de sodium (NaHCO3)
Dose
1,91

Augmentation de l'alcalinité (TAC) et du TH (en °F par mg de NaHCO3 injecté) :

TAC, °F
0,119
TH, °F
0


Réactifs qui agissent uniquement sur la dureté calcique (pas de neutralisation du CO2) :

Augmentation de la dureté TH, selon le réactif employé (mg de réactif pur anhydre à injecter pour 1°F augmenté) :

Réactif >
chlorure de calcium
sulfate de calcium
mg
11,1
13,6

NB :
Les doses indiquée sont pour un réactif à 100% de pureté et il est nécessaire de corriger cette dose en tenant compte de la pureté (en réactif pur 100%) du produit commercial.

CORRECTION DES DOSES EN FONCTION DU PRODUIT COMMERCIAL :

Quantité en masse (poids) de produit commercial :

Qm = (100 / p)Dt

Quantité en volume de produit commercial :

Qv = (1 / d x Qm)
ou,
Qv = (1 / C x Dt)


Avec,


EXEMPLES.
Exemple 1  :
Dose théorique Dt de chaux Ca[OH]2 indiquée = 30 g/m³ d’eau,

Quantité en poids de chaux solide commerciale (Qm) : (100/90,9)30 = 33 g/m³ d’eau,

Quantité en volume de chaux en solution (Qv) : (1/1,65 x 30) = 18,19 litre / m³ d’eau.


Exemple 2  :
Dose théorique Dt de carbonate de sodium Na2CO3 indiquée = 40 g/m³ d’eau,

Quantité en poids de carbonate de sodium solide commercial (Qm) : (100/96)40 = 41,7 g/m³ d’eau,

Quantité en volume de carbonate de sodium en solution (Qv) : (1/50 x 40) = 0,8 litre / m³ d’eau (800 ml/m3)

Exemple 3  :
Dose théorique Dt de soude NaOH indiquée = 25 g/m³ d’eau,

Quantité en poids de soude commerciale (Qm) : (100/30)25 = 83,3 g/m³ d’eau

Quantité en volume de soude commerciale (Qv) : (1 / 1328 x 83,3) = 0,0627 litre / m³ d’eau (ou 62,7 ml/m3).
............................................................ou (Qv) : (1 / 398,4 x 25) = 0,0627 L/m³.



-




Traitement par REMINÉRALISATION.
Les traitements élémentaires de neutralisation précités ne permettent pas de conférer les caractéristiques optimales souhaitées à toutes les eaux. C'est le cas des eaux douces contenant peu ou pas de gaz carbonique, ainsi d'ailleurs que des eaux sursaturées à pH supérieur à 8,3.
Pour obtenir le résultat souhaité, il est nécessaire d'appliquer à ces eaux un traitement de reminéralisation qui leur conférera une minéralisation supérieure à celle que l'on obtiendrait par un traitement élémentaire de neutralisation carbonatée ou non.

Reminéralisation par injection de CO2 suivie d'une neutralisation par réactifs neutralisants.
En général, il est procédé à l'injection de gaz carbonique (CO2) dans l'eau, avant l'introduction ou de filtration par réactif neutralisant.
Ceci s'effectue à la base de colonnes ou de cuves spécialement aménagées : le CO2 est injecté par de simples tubes ou mieux par des buselures calibrées ou des diffuseurs poreux.
On obtient donc de l'eau acidulée contenant donc une certaine quantité d'acide carbonique (CO2+H2O) dans laquelle le produit basique (neutralisant de cet acide) sera introduit, ou l'eau acide sera ensuite envoyée sur un filtre à base alcaline pour y être neutralisée :

Filtres à base de carbonate de calcium :

Nota : une consommation de la masse filtrante sera donc effectué en fonction de la quantité de CO2 agressif présent dans l'eau acide et du % en CaCO3 de cette masse.


NOTA - Solubilité du CO2 :
La solubilité du dioxyde de carbone (gaz carbonique) dans l'eau, dépend de la température et de la pression partielle de ce gaz au-dessus de l'eau.
Soit, par exemple, ci-dessous la quantité de dioxyde dissous dans l'eau pure, au maximum (en mg/l), sous pression de CO2 = pression atmosphérique.

Notons les valeurs maximum suivantes :

< Nota : lien interne sur le CO2 >

Reminéralisation par injection de bicarbonate de soude et d'un sel fort de calcium.
Ce traitement concerne les eaux douces à faible teneur mais néanmoins sursaturées en CO2 libre.
L'injection de bicarbonate de soude "transforme" le CO2 agressif en CO2 libre. Il est possible que la seule action du bicarbonate permette d'atteindre la zone d'équilibre souhaitée.
Le traitement doit être complété (ou précédé) par une adjonction de sels forts de calcium, le sulfate de calcium ou le chlorure de calcium, dont l'utilité est :

 
Conclusion sur les traitements de reminéralisation.

* Le procédé idéal est l'injection de CO2, suivie d'une neutralisation.
On peut faire au sujet de cette technique, les observations suivantes :

- elle ne met en oeuvre que des produits présents dans pratiquement toutes les eaux naturelles et dont l'action ne saurait être mauvaise
- elle est cependant plus complexe que l'autre technique envisagée puisque, pour agir séparément sur le TAC et le TH, il faut deux réactifs en plus du CO2.....

* La technique par injection de bicarbonate de soude et d'un sulfate ou d'un chlorure de calcium est valable dans la mesure où, à l'issue de ce traitement, l'eau ne contient pas trop d'ions sulfates (SO42-) ou chlorures (Cl-) qui favorisent l'attaque des matériaux même à des teneurs très inférieures aux limites autorisées. L'opportunité du procédé et les taux de traitement seront examinés en tenant compte :






VARIANTE POSSIBLE DU TRAITEMENT :
L'injection de CO2 est toujours associée à une neutralisation, sauf bien entendu, s'il s'agit d'une eau sursaturée. De plus, ce traitement doit souvent s'insérer dans un traitement complet de coagulation/floculation (processus d'agglomération et de précipitation des particules
En ce cas, il y a plusieurs possibilités :

Cette dernière manière de procéder, n'est possible que sur les eaux dont le TAC est assez faible pour qu'il n'y ait pratiquement aucune décarbonatation. Son intérêt est double :

- le CO2 est très facilement retenu dans l'eau qui contient alors essentiellement de la chaux et un peu de carbonate.

- le contrôle du traitement s'opère en vue d'obtenir un pH déterminé en agissant sur le débit de gaz carbonique beaucoup plus facile à régler que celui de la chaux. La qualité de la régulation est très améliorée si l'injection de CO2 se fait en dernier, juste avant prélèvement de contrôle du pH.

Notons également que si l'injection de CO2 est faite avant l'entrée d'une filtration, il faut éviter toute chute à l'entrée sur ces derniers pour éviter le dégazage.

Remarques finales.
Des difficultés sont quelquefois rencontrées pour amener les eaux à l'équilibre parfait :

* Si cet équilibre est obtenu par l'injection d'un réactif, le dosage de celui-ci doit être très précis après avoir été déterminé en fonction des caractéristiques de l'eau en fin de traitement. Toute erreur due à un dosage défectueux ou à une modification des caractéristiques de l'eau peut conduire à une eau agressive ou entartrante.

* Une eau trop douce, même équilibrée vis-à-vis du calcaire, ne produira pas un dépôt protecteur souhaité de carbonate de calcium, à moins d'un traitement de recarbonatation que l'on hésite parfois à adopter.

* Il est, en pratique, difficile de conserver à l'équilibre, une eau qui le serait au départ de l'usine de traitement.
En effet, toute modification de température rendra cette eau , dans le réseau ou chez l'abonné, soit agressive, soit incrustante.

* Une eau, même parfaitement équilibrée, peut demeurer corrosive à l'égard des métaux et les inconvénients qui en résultent durent tant qu'un dépôt protecteur n'aura pas revêtu la totalité des surfaces métalliques au contact de l'eau.

Pour ces raisons, on complète parfois les traitements d'amenée à l'équilibre exposés précédemment par un traitement d'inhibition qui paralyse, en quelque sorte, la capacité agressive ou entartrante de l'eau.


Bibliographie.
(Concernant l'ensemble des textes sur les équilibres)
-W.F. LANGELIER. Analytical control of anticorrosion water treatment. J.A.W.W.A., 18, (1936), 1500
-LANGELIER. Étude de l'indice de saturation. Influence de la température. J.A.W.W.A., 38, (1946), 179-189
-L. LEGRAND, G. POIRIER. Théorie des eaux naturelles. Eyrolles Ed., 1972
-L. LEGRAND, G. POIRIER, P. LEROY. Les équilibres carboniques et l'équilibre calcocarbonique dans les eaux naturelles. Eyrolles Ed., 1981
-C.P. HOOVER. Practical Application of the Langelier methods. J.A.W.W.A., 30 (11), (1938), 1802.
-FRANQUIN, MARECAUX. 18e congrès de chimie industrielle. Nancy, (1938), 229-237
-L. COIN. Détermination de l'agressivité des eaux naturelles. Ann. d'Hyg. publ. industrielle et sociale. XX, (5), (1942), 145
-COLAS. L'eau. 6, 7, 7 (1949), 105, 121, 133
-HALLOPEAU. L'acide carbonique dans l'eau. T.S.M. (1949). 1-11
-R. COLAS. Les eaux douces. CBEDE, 37, (1953), 161
-Cl. SCHMITT. Thèse Fac. Sci. Rennes, (1955) et l'eau, 11, (1956), 143-249.
-J. HALLOPEAU. Les équilibres carboniques dans les eaux. Terres et Eaux n°35. 1960-61. -R. GIRARD. Méthode d'étude d'une eau naturelle à partir de son analyse,
L'eau, n°5 (1967), 199
-I.G. FAUGERE. Interprétation pratique des résultats analytiques relatifs à l'agressivité de l'eau et à l'entartrage. Prod. Pharm., vol. 24, n°9, (1969), 491.

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