Potabilisation des eaux - Traitements spécifiques

Manganèse (Démanganisation par la voie physico-chimique).
Formule : Mn - Masse molaire : 54,9380 g/mol
Nota : pour le traitement par voie biologique de ce métal (voir ici)
Principales formes minéralogiques cristallines, dans la nature :

Types chimiques
Nom
Formule

Oxydes

Hausmanite

Mn3O4

" "

Braunite

Mn2O3

" "

Manganite

Mn2O3, 3H2O

" "

Pyrosulite

MnO2 (alpha)

" "

Polyanite

ß - MnO2

" "

Vernadite

õ - MnO2

" "

Psilomélane

MnO2, H2O

" "

Birnessite

NaCa[MnO2]7, 3H2O

Sulfures

Albandite

MnS

Carbonates

Rhodocrosite

MnCO3

" "

Manganosidérite

[Fe,Mn]CO3

Silicates

Rhodonite

MnSiO3

Les eaux à potabiliser
Comme pour le fer, le manganèse peut avoir plusieurs formes dans les eaux naturelles, rappelons qu'il peut prendre les formes d'oxydation de +2 à +7, mais en pratique on en trouve surtout quatre, soit : +2, +3, +4 et +7.
Origine du manganèse dissous dans les eaux souterraines ou les eaux à caractère réducteur.
La dissolution du manganèse peut être effectué :

Les activités de l'homme contribuent largement à l'apparition du caractère réducteur des eaux souterraines.
Dans certains cas, la cause initiale est la pollution d'une rivière, l'infiltration d'effluents urbains après lagunage, la modification du régime d'un cours d'eau (barrages, canaux), etc., tous ces phénomènes pouvant entraîner des répercussions ultérieures sur les eaux sous-jacentes.
Les phénomènes chimiques qui provoquent cette dissolution sont également variés :

on assiste souvent à l'association de plusieurs de ces réactions, l'activité microbienne du sol est généralement à la base de tous ces phénomènes, qui sont doncsouvent de nature biochimique.

Les concentrations en manganèse des eaux souterraines sont en moyenne 10 fois moins fortes que les concentrations en fer, alors que ce rapport est de l'ordre de 1/50 dans la croûte terrestre ; cette différence montre que Mn (II) a tendance à être plus stable que Fe (II) dans les eaux naturelles (certaines eaux souterraines ne contiennent d'ailleurs que du manganèse), ce qui est confirmé par l'étude des diagrammes de stabilité (voir ci-après).
La stabilisation par formation de complexes avec des ligands organiques ou inorganiques sont plus rares qu'avec le fer, mais existent : on peut donc rencontrer des niveaux de difficulté comparables dans l'élimination de chacun des deux éléments.
La grande majorité des eaux de surface en équilibre avec l'atmosphère est située dans une gamme de pH allant de 5 à 8,2 et un intervalle de potentiel redox compris entre 0,3 et 0,48 Volt.
Ces quatre points extrêmes définissent sur le diagramme suivant une surface ABCD (zone stable) qui caractérise le domaine d'existence des eaux naturelles en équilibre avec l'atmosphère.

 

On peut voir :

Par ailleurs, le diagramme de stabilité montre les domaines de stabilité de l'ion Mn2+ et des oxydes Mn2O3 et MnO2 dans les conditions de pH des eaux naturelles : on voit que le passage des formes réduites et ionisées aux formes oxydées et précipitées, qui sera pour cet élément le principe de base du traitement, demande des conditions beaucoup plus oxydantes pour le manganèse que pour le fer, la différence entre les E(v) critiques respectifs étant d'environ 400 mv. Ces propriétés chimiques des deux éléments nous permettront de comprendre pourquoi :

La grande stabilité de l'ion Mn2+ (soluble) dans les eaux souterraines : gamme de pH de 5.5 à 8 et de 80 à 400 mv, sera avérée tant qu'un traitement correcteur ne modifie pas ces conditions naturelles de pH et de potentiel redox.
Complexes : comme le fer, le manganèse est susceptible d'être complexé par des substances minérales (silice dissoute, en particulier) ou organiques (acides humiques et fulviques) ; de tels phénomènes sont cependant plus rares qu'avec le fer.

Paramètres à prendre en considération au niveau d'un projet.
Les formes dissoutes du manganèse doivent être déterminées in situ, au moment du prélèvement :
en effet une évasion éventuelle du CO2 dissous risque de provoquer des précipitations de carbonate de manganèse (MnCO3). Il conviendra donc de disposer d'une analyse complète de l'eau brute, qui pourra permettre de choisir judicieusement le mode de traitement et d'anticiper sur certains problèmes d'exploitation :

Détermination sur place la plus grande partie de ces caractéristiques, en ayant procédé à une exploitation suffisante du forage pour être certain de la représentativité de l'échantillon.

Rappel : le traitement doit permettre de fournir une eau d'alimentation conforme aux normes européennes :


Procédés physico-chimiques d'élimination du manganèse (en potabilisation).
Ce sont :

PRINCIPE DES TRAITEMENTS (GENERALITES).
Les traitements correcteurs sont basés sur l'oxydation de ce métal sous forme insoluble en modifiant le potentiel d'oxydation et /ou le pH, ou l'utilisation de bactéries spécifiques.
Principe chimique : passage de la forme dissoute du manganèse divalent (Mn2+) à une forme précipitée [MnO2 ; MnCO3].
Les formes oxydées ou carbonatés précipitent pour être retenues, soit en décantation, soit en filtration.
Il suffit donc, en principe, d'oxyder en manganèse divalent (dioxyde de manganèse, MnO2) insoluble dans les conditions de pH du milieu, pour obtenir sa précipitation et pouvoir le séparer.

<< Le problème n'est cependant pas aussi simple qu'il n'y paraît et la démanganisation est en fait un traitement très délicat qui mérite beaucoup d'attention pour éviter des échecs retentissants >>

Le manganèse, comme le fer, peut se trouver en effet (à des pH > 4), sous forme colloïdale. Il peut également former des complexes stables avec les matières organiques, la silice ou les phosphates. Dans tous ces cas, il faudra adopter des dispositions particulières pour déstabiliser les colloïdes et/ou détruire les complexes.
Il est donc parfois nécessaire d'avoir recours à la coagulation - floculation pour éliminer à la fois le Mn et les matières organiques. dans tous les cas il faut faire appel à un oxydant puissant, autre que la simple aération (oxydation par l'oxygène de l'air) tel que le dioxyde de chlore ou l'ozone.

Dans les traitements biologiques de ce métal, il est fait appel à des micro-organismes spécifiques dont le métabolisme dépend étroitement des conditions de rH et, par conséquent, de pH.

Principe du traitement précipitation/filtration classique.
Schéma de base.
Il est basée sur l'emploi d'un oxydant fort : dioxyde de chlore, permanganate de potassium ,ozone et quelquefois le chlore.
Mais en France l'air est souvent utilisée en tête de traitement pour plusieurs raisons :

L'oxydation par l'oxygène de l'air n'est en général concevable que pour un pH alcalin
(au moins 9 à 9,5) ; l'oxydation par le chlore est possible, mais on se trouve en présence d'un fort excès de chlore qu'il faut ensuite neutraliser.
Par contre, on obtient une oxydation suffisamment rapide par le dioxyde de chlore, le permanganate de potassium ou l'ozone qui amènent le manganèse divalent à l'état d'oxydation + 4 et le précipitent sous forme de dioxyde de manganèse.

Exemples réactionnels :
( Mn précipite sous forme de dioxyde de manganèse MnO2)

Dioxyde de chlore (ClO2) :

Mn2+ + 2 ClO2 + 2 H2O >>> MnO2 + 4 H+ + 2 Cl- + 2 O2

Permanganate de potassium (KMnO4) :

3 Mn2+ + 2 MnO4- + 2 H2O >>> 5 MnO2 + 4 H+

Ozone (O3) :

Mn2+ + O3 + H2O >>> MnO2 + O2 + 2 H+

D'après ces réactions, les quantités théoriques d'oxydant à mettre en oeuvre sont respectivement, (pour 1 mg/l de Mn2+ :

En fait, la dose réelle peut s'en écarter sensiblement, en fonction :

En pratique, la dose d'oxydant sera de :

Le taux exact de traitement ne peut donc être déterminé qu'expérimentalement.
Par ailleurs, on réalise souvent une économie importante d'oxydant chimique en l'appliquant après une aération, laquelle aura déjà agi auparavant sur les substances facilement oxydables, en particulier le fer divalent et/ou le sulfure d'hydrogène (H2S).
Un excès de réactif par rapport à la demande de l'eau brute, s'il n'entraîne rien de fâcheux dans le cas du dioxyde de chlore, provoque par contre la présence d'ion permanganate résiduel dans l'eau traitée lorsque le traitement est effectué au KMnO4 ou à l'ozone (permanganate en excès dans le premier cas, oxydation du Mn4+ en Mn7+ par excès d'O3 dans le second) :
l'eau traitée présente alors une couleur rosé, qui vire ensuite au jaune-brun dans le réseau de distribution (rétrogradation du Mn7+ en Mn4+, avec précipitation de MnO2 colloïdal).

Il est donc indispensable de bien contrôler la dose d'oxydant introduite

Du point de vue technologique, ces procédés d'oxydation énergique du manganèse peuvent s'intégrer aux mêmes installations (gravitaires ou sous pression) que celles qui ont été vues plus haut pour la déferrisation, avec ou sans décantation : il ne s'agit souvent que d'ajouter un réactif supplémentaire.

Modalités particulières de la démanganisation classique :

Emploi de l'ozone : la tour de contact eau-ozone remplace, en principe, l'aération classique vue plus haut ; toutefois, on peut avantageusement pratiquer une pré-aération. en utilisant l'air issu d'une tour de contact, où il reste encore des traces d'ozone utilisables.
D'autre part, ce traitement pouvant former du permanganate si l'ozone est en excès, on peut avoir avantage à filtrer l'eau oxydée sur anthracite (en filtre monocouche ou bicouche) ou sur charbon actif plutôt que sur sable ; le charbon joue en effet dans ce cas, un rôle réducteur du MnO4- (correspondant à l'ion Mn7+ et présent, par exemple, sous forme de KMnO4) en Mn4+qui précipite sous forme de MnO2 :

4 KMnO4 + 3 C* >>> 4 MnO2 + 3 CO2 + 2 H2O

Nota : C* correspond au charbon actif.

Matières organiques :
(certaines eaux souterraines riches en acides humiques, ou eaux de fond de retenues en état d'eutrophisation), dans ce cas il faut retenir que :

Paramètres importants de la capacité d'oxydation

 A titre d'exemple, voir ci-joint :

Action de la température et du temps sur le % d'oxydation avec l'utilisation de KMnO4

 

Action du pH et du temps sur le % d'oxydation avec l'utilisation de KMnO4

 

Nota : le résiduel de Mn correspond à la concentration de cet élément dans l'eau par rapport à celle de l'eau initiale.



Principe du traitement par filtration catalytique.
Schéma de base.
Il est basée sur l'emploi d'un matériau spécial : zéolithes ou oxyde de manganèse naturel (pyrolusite), résines synthétiques (aux USA).
Le matériau filtrant joue en même temps le rôle d'oxydant et/ou d'échangeur d'ions.
Ils sont généralement mis en oeuvre sans aération ni réactifs, sauf pour des cas particuliers : ajustement de pH et/ou de niveau d'oxydation, ou pour effectuer une régénération du matériau.
A noter que ces procédés traitent également le fer ferreux ou l'arsenic.
Filtration sur zéolithes.
La plus classiquement utilisée est (était ?) le "sable vert manganisé" obtenu à partir d'une zéolithe naturelle, la glauconie.
Egalement, des produits filtrants tels que des tectosilicates volcaniques (clinoptilolite, chabazite) ont été quelquefois utilisés.
Ces procédés sont intéressants en cas de variation importante du manganèse.

Principes chimiques du "sable vert" :

  1.  
  2. la zéolithe (Z-Na2) est enrichie en manganèse Mn2+ par percolation d'une solution de sulfate manganeux , soit :
    1. Z-Na2 + Mn2+ >>> Z-Mn + 2Na+
  3. ce manganèse fixé est ensuite oxydé en MnO2 par percolation d'une solution de KMnO4 (permanganate de potassium), et l'on obtient Z-(MnO2)x.

La percolation de l'eau à traiter sur cette zéolithe manganisé permet de fixer le Mn dissous par transformation du MnO2 de la zéolithe en sesquioxyde de manganèse Mn2O3 , soit :

Z-(MnO2)x + Mn2+ + H2O >>> Z-(Mn2O3)x + 2H+

NB - lorsque tout le dioxyde MnO2 de la zéolithe est converti en Mn2O3, il est indispensable derégénérer le matériau avec un oxydant fort (généralement le KMnO4), exemple :

Z-(Mn2O3)3 + 2MnO4- + H2O >>> Z-(Mn2O2)8 + 2OH-



Filtration sur oxyde de manganèse naturel.
L'oxyde naturel est issue de l'industrie minière, le plus répandue étant la pyrolusite, broyée et criblée, c'est un dioxide de manganèse MnO2.
Autres variétés moins répendues : la psilomélane, la cryptomélane et la ramsdellite.
Les matériaux commercialisés ont en général une teneur en MnO2 entre 70 et 80 %.
Nota - le produit est lourd : densité entre 3500 et 4000 kg/m3. Il se présente sous la forme de petits grains noirs. Le point de fusion est d'environ 535°C (produit pur).

Principes chimiques du dioxyde de maganèse : le même que pour les sables verts maganisés, la phase de préparation en moins puisque le produit est déjà sous forme MnO2.
Paramètres importants de la capacité d'oxydation :

Constitution des filtres :
Si absence de fer (<03 ppm) et de turbidité (<5 NTU), on peut traiter sur une couche de dioxyde de maganèse seule, avec une hauteur minimale de 1 m (à vérifier le temps de contact réel).
Sinon, deux solutions sont envisables :

 A noter que :

Régénération :
Lorsque toute la surface des grains de MnO2 est transformée en Mn2O3, il doit être procédé à une régénération du matériau (on le constate par une augmentation de la "fuite" en Mn2+ en sortie de filtre)
Plusieurs méthodes sont possibles, l'une d'elle consiste à laisser le matériau en contact pendant au moins 10 h avec du KMnO4 ou du chlore libre, puis de rincer abondamment avant la remise en production.

Par exemple, si la teneur en manganèse de l'eau de sortie est comprise entre 20 et 70 µg/L, on peut appliquer des rétrolavages hebdomadaires à l’eau chlorée pour avoir 0,2 à 0,3 mg/L de chlore libre résiduel dans l’eau de rinçage,

- si la concentration en manganèse est supérieure à 70 µg/L, on appliquera une régénération en continu par ajout d’oxydant (chlore en absence de NH4+ ou KMnO4 en présence de NH4+), correspondant à la stoechiométrie.

Précautions diverses :

- un définage (enlévement des grains les plus fins) doit obligatoirement être éffectué sur chaque installation, plusieurs lavages (vitesse en eau de l'ordre de 20 m/h) seront donc nécessaire avant la mise en route réelle. Les volumes d'eau utilisés sont très variables, mais souvent supérieurs à 4 volumes d'eau par volume de matériau.

- des précautions d'utilisation (lors de la mise en place par exemple) doivent être prise afin d'éviter d'ingérer la poudre de MnO2 : il peut provoquer des troubles nerveux et respiratoires; la valeur limite dans l'air serait de 5 mg/m3 d'air (normes US). Une fiche toxicologique existe (INRS, N°52).

Nota : - composés minéraux de dioxyde que l'on trouve sur le marché (et qui ont été testé) : l'Aqua-mandix (EUROCHLORE S.A.), le Mangagran, la Polarite, le Greensand ou la Mangalit (matériau recouvert artificiellement de dioxyde de manganèse).

- Filtres multicouches basés sur l'utilisation de Sable/MnO2/Hydroxyde de fer proposés dans l'industrie :
Ex :
OTV / Veolia Water Technologies ( lien ) >
• Mangaflo™ et Mangaflo™ Plus pour l'élimination du manganèse, du fer et de l'arsenic,
Metclean™ pour l'élimination des métaux et métaux lourds : manganèse, arsenic, cadmium, plomb, zinc, nickel, fer, uranium, etc.





 

 


Principe du traitement par précipitation basique (associé à une décarbonatation).
Principes de base.
Ce type de traitement s'appliquera surtout aux eaux très dures qui nécessitent un adoucissement.
La décarbonatation à la chaux est favorable à l'élimination du fer et du manganèse divalents (donc dissous) par précipitation des carbonates et hydroxydes correspondants.
(revoir éventuellement le principe de la décarbonatation (adoucissement > lien interne).

En ce qui concerne le manganèse, les pH et Ev de précipitation en décarbonatation classique,sont proches de :

Par ailleurs, en décarbonatation catalytique (rappel : voir lien interne, les décanteur accélérés), les pH sont plus bas (vers 8), et la démanganisation est satisfaisante : cet effet serait attribué à des réactions de co-précipitation des différents carbonates, MnCO3, CaCO3 et FeCO3.
Nota : la magnésie (MgO ou Mg[OH] a été quelquefois utilisée aux USA.


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Nitrates (dénitratation).
Formule : NO3- - Masse molaire : 62,0049 g/mol
(voir sur ce sujet le site web de l'ERB, Eaux & Rivières de Bretagne)
Rappel sur les eaux à potabiliser

Les eaux à potabiliser proviennent soit d'eaux de surface, soit d'eaux souterraines.
L'azote se trouve généralement dans les premières sous forme ammoniacale. alors que c'est sa forme nitrique qui, la plupart du temps, est présente dans les secondes, cependant d'autres cas de figure existent.
Le traitement doit alors permettre de fournir une eau d'alimentation conforme aux normes européennes :

une limite de 25 mg/l est souvent demandé concernant l'eau de distribution publique

Rappel - Textes divers :
• La directive européenne du 12 décembre 1991 (dite Directive Nitrates) impose la lutte contre la pollution des eaux par les nitrates d’origine agricole.
• Le code (national) de bonne pratique agricole fait l’objet de l’arrêté du 22 novembre 1993.
• L’arrêté du 2 novembre 1993, appliquant la loi sur l’eau de 1964 et l’accord avec la profession agricole, prescrit des programmes de résorption dans les cantons en Zones d’Excédent Structurel (ZES).

Nota : dans le milieu naturel les produits azotés évoluent,car le transit (stockage et rivière) modifie notablement la composition de l'eau, et particulièrement, les teneurs en composés azotés.
Deux situations principales se rencontrent généralement au captage :
- eau de surface : concentration de 20 à 80 mg/l en NO3 , présence de composés organiques et turbidité moyenne ou forte,
- eau souterraine : concentration de 10 à 150 mg/l en NO3 , très faible turbidité.




Rappel des procédés d'élimination des nitrates (en potabilisation).
II est certainement intéressant de rappeler rapidement les différents procédés.
Ce sont :

Dans l'échange d'ions, l'eau est filtrée sur des billes de résines anioniques synthétiques qui échangent les nitrates, ainsi que tous les autres anions de l'eau, contre un autre anion préalablement fixé.
De nombreuses études et réalisations ont permis de maîtriser ce procédé et d'en minimiser les inconvénients comme la dissolution de trace de produits chimiques composant la résine, ce qui était évidemment en préalable nécessaire à l'utilisation des résines (voir plus loin).

L'osmose et l'électrodialyse (voir Traitement par membranes) sont des procédés mettant en oeuvre des membranes synthétiques qui s'opposent au passage des sels dissous dans l'eau. Tous deux sont également parfaitement maîtrisés mais très coûteux en énergie électrique et en investissement. Ils sont, pour l'instant, principalement réservés au traitement de l'eau saumâtre, quand aucune source d'eau douce ne peut-être trouvée...........................................



Un inconvénient des traitements physico-chimiques réside dans le fait que les nitrates sont extraits de l'eau, mais non éliminés. Ils se retrouveront donc d'une manière ou d'une autre sous forme de déchet.
Un autre inconvénient réside dans le bouleversement profond de la minéralisation de l'eau qu'ils entraînent pouvant conduire :

- soit à une minéralisation incompatible avec les normes de potabilité (augmentation trop importante des chlorures, par exemple),

- soit à la nécessité d'une correction de la minéralisation totale presque totalement éliminée par le traitement.

La dénitrification par voie biologique ne présente pas ces inconvénients, mais demande une surveillance d'exploitation plus poussée.
Ces procédés utilisent les propriétés de certaines bactéries (présentes dans le milieu naturel) et peuvent utiliser l'oxygène des nitrates pour leurs métabolismes.

N.B. - dans le présent chapitre, seuls le procédé de traitement par échange d'ions sera examiné.

Principes succincts de l'échange d'ions
NOTA : si nécessaire, revoir ici les principes généraux de l'échange d'ions, et ici un glossaire des termes utilisés (ces liens sont internes au site).
Les résines échangeuses d'ions sont des produits synthétiques possédant des fonctions chimiques actives capables, sous certaines conditions, d'échanger certains ions contre d'autres.
On distingue les résines cationiques, échangeurs d'ions électropositifs (cations), les résines anioniques, échangeurs d'ions électronégatifs (anions).
Les résines utilisées pour l'enlèvement des nitrates sont des résines anioniques.

Principes de la dénitratation :
Soit R-Cl, la représentation simplifiée d' une résine anionique saturée en chlorure.
Principaux anions dans l'eau : HCO3-, SO42-, Cl-, NO3-(soit A-).
L'eau contient également des cations divers : Ca2+, Mg2+, etc. (soit C+). Nous avons :

[C+ , A-] + R-Cl- >>>>>>>>>>>>> R- A- + [Cl- , C+ ]
eau..........résine..............................ion fixé...ion libéré

La dénitratation anionique s'effectue en deux temps :

1 - Tout d'abord, la phase de production d'eau dénitratée au cours de laquelle l'eau brute chargée en nitrates percole à travers les résines (généralement de haut en bas).
Les ions nitrates, sulfates et, plus faiblement, bicarbonates se fixent sur la résine laquelle libère dans l'eau traitée des ions chlorures en quantité équivalente.

4 R-Cl + (NO3-, SO42-, HCO3-) >>> 2 R - [NO3, SO4, HCO3] + 4 Cl-

A la sortie du réacteur, l'eau dénitratée est mélangée avec de l'eau brute dans un rapport de débits permettant d'obtenir à la distribution une teneur résiduelle en nitrates (< 25 mg/1 ou moins), correspondant au niveau guide de la norme européenne. Cependant, la production de l'échangeur doit être arrêtée lorsque la résine atteint un niveau de saturation tel que la teneur en nitrates dans l'eau traitée dépasse le seuil que nous avons préalablement fixé (souvent 5 mg/1 au point d'arrêt).

2 - La phase de régénération des résines, qui s'effectue par passage à contre-courant de l'épuisement, c'est-à-dire de bas en haut, d'une solution concentrée de chlorure de sodium NaCl :

2 R - [NO3, SO4, HCO3] + 4 NaCl >>>> (NaNO3, Na2SO4, NaHCO3) + 4 R-Cl
.........résine saturée ...............saumure..........................éluats........................résine régénérée


Cette inversion de flux permet d'une part une excellente régénération des couches inférieures de résines, généralement moins saturées, par la saumure la plus concentrée, et d'autre part d'améliorer, pendant la phase de production, l'échange anionique, car les eaux descendantes, progressivement appauvries en nitrates, rencontrent des résines de mieux en mieux régénérées.
Pour ce faire, certaines sociétés ont adapté et amélioré la technique du blocage à l'air mis en oeuvre de longue date sur les chaînes de déminéralisation destinées à la production d'eau de haute pureté (domaines nucléaire ou électronique) ; ainsi, pendant la phase de régénération, une injection d'air comprimé dans la partie supérieure de l'échangeur permet la formation d'un "couvercle" de résine essorée qui s'oppose à l'expansion du lit de résine sous l'effet du flux régénérant. De plus, il est possible de procéder au décolmatage et définage périodique des résines par simple soulèvement à l'eau et sans aucun équipement complémentaire.
La technique avec régénération à co-courant, c'est-à-dire de haut en bas, est plus simple, car elle ne nécessite pas de blocage de la résine, mais par contre les volumes de saumure et d'eau de rinçage sont plus important (40 à 50% de plus), un rendement (abattement) de l'ordre de 85 à 90%, contre 95 à 97% à contre-courant (pour une quantité de régénérant donné).

Nota : Pour éviter l'expansion de la résine (ce qui nuirait à l'efficacité de la régénération), un blocage de celle-ci est souvent réalisé à l'air, sur des résines inertes chimiquement.
Le procédé MANESMANN utilise un blocage en production (passage de bas en haut) par un lit de gravier et une couche de résine inerte, la régénération s'effectuant par courant descendant.
Les ntrates sont donc déplacés, mais non éliminés, et se retrouvent dans les éluats, non biodégradables facilement, dont l'évacuation posent problème.
En fait, ceux-ci peuvent être :

Les capacités de fixation des résines sont fonction des quantités de régénérant utilisés (taux de régénération exprimé en g de chlorure de sodium par litre de résine). Elles sont en général, selon les types de résines et ies modes de régénération utilisés, de l'ordre de 0,25 à 0,6 équivalent N03 / litre de résine, soit 15 à 37 g N03 / litre.

Critères limitatifs
Matières organiques, détergents, métaux (épuisement de la résine et réduction de capacité),

Modalités d'application du procédé.
A l'entrée du réacteur, l'eau à traiter doit être exempte de :

Débit à traiter : il n'est traité une fraction du débit de l'usine et par cette fraction le taux de nitrates est abaissé à la valeur souhaitée, après mélange.

Résine : la résine utilisée doit être choisie parmi les résines ayant l'agrément du ministère de la Santé.
Le volume à mettre en œuvre est fonction de :

En général, la hauteur de résine est comprise entre 1 et 2 m et la vitesse de percolation entre 20 et 40 m/h.
L'usure mécanique et/ou chimique de la résine fait qu'il est nécessaire d'opérer un rechargement annuel compris entre 3 et 5 % du volume total.
Périodiquement il peut être nécessaire de nettoyer les résines :

Enfin, la réglementation rend obligatoire une désinfection de la résine (acide peracétique).

Echangeurs : le nombre d'échangeurs et leurs caractéristiques dimensionnelies résultent des calculs économiques du constructeur.
Leur nombre doit permettre d'assurer la continuité de la production durant la régénération dont la durée est de 1 h 1/2 à 2 h.
Le débit transitant par chaque échangeur est souvent régulé (vanne associée à un débitmètre).

Ci-joint un schéma montrant un exemple d'échangeur à contre-courant

1 - Entrée d'eau

2 - Sortie d'eau

3 - Entrée réactifs

4 - Sortie réactifs

5 - Entrée d'air

6 - Sortie d'air

7 - Sortie rinçage

8 - Purge d'air

-

vanne ouverte

vanne fermée

-

Régénérant : pour la régénération il est utilisé une solution saturée (saumure) de chlorure de sodium préparée à l'aide de sel gemme de qualité alimentaire ayant les caractéristiques suivantes :

Exemple des caractéristiques essentielles d'une saumure :
Eléments composant 1 m3 :

Production de saumure par dissolution de 1 t de sel :

Saumure obtenue à partir de 1 m3 d'eau :

Le principe des installations de préparation de saumure saturée, fonctionnant en automatique, consiste à faire traverser une masse de sel par un courant ascendant d'eau douce, durant un temps suffisant pour que l'eau recueillie à la surface soit saturée en sel.
La saturation est réalisée dans un silo dissolveur dont le dimensionnement doit tenir compte notamment :

La saumure injectée dans l'échangeur est souvent diluée à 60 g/l.

Exemple de saturateur de saumure (fosses en béton)

C - Détecteur de niveau

F - Flotteurs (asservissements)

G - Flotteur (arrivée d'eau douce)

 

 

EFFICACITÉ DU TRAITEMENT
Les rendements d'élimination sont, à peu de chose près, les suivants :

Au cours d'un cycle on assiste à une variation du pH et du TAC.
Il faut donc éviter de relever celui-ci en amont de l'installation et prévoir en aval une neutralisation ou une reminéralisation.
Le relargage des ions hydrogénocarbonates peut entraîner un entartrage du réseau d'évacuation des éluats, si l'eau de préparation de la saumure est fortement alcaline. Il est alors nécessaire d'utiliser de l'eau adoucie.
Le désentartrage peut être réalisé à l'aide d'acide chlorydrique à 5 %.

Exemple de variation des principaux éléments au cours d'un cycle d'épuisement :

Exemple de variation des principaux éléments au cours d'une régénération :



Exemple d'installation industrielle (élimination des nitrates par échanges d'ions).
Usine de PLEVEN
(arrondissement de Dinan, département des Côtes d'Armor (Bretagne).
Exploitation par le
syndicat mixte Arguenon-Penthièvre : 115 communes, associées, devenu depuis le plus important producteur d'eau du département des Côtes-d'Armor.
Pour faire face aux pollutions par les nitrates et les pesticides, il a été mis en place en 1992 une filière de traitement des nitrates par résine échangeuse d'ions, d'un débit de 20.000 m3/jour, et une filière de filtration sur charbon actif en grain, agissant sur le goût, la couleur et les pesticides, permettant ainsi de fournir une eau conforme aux normes française et européenne.
Pour éviter les rejets des éluats chargés de nitrates dans le milieu naturel, ceux-ci sont transférés dans une usine de transformation d'engrais en Ille-et-Vilaine par une canalisation franchissant le barrage de la Rance.
En 1996, l'usine et le réseau ont été entièrement automatisés, apportant une certaine sécurité dans la protection de la distribution de l'eau et une amélioration de la qualité de l'eau chez l'abonné.
Nota : l'Arguenon est un fleuve côtier qui se jette dans la Manche près du château du Guildo, et est remonté par la marée jusqu'à Plancoët.
Objectif du traitement.
Outre la clarification de l'eau brute, il sagit d'éliminer les pesticides et leurs dérivés, et :

A noter que les nitrates varient de 35 à 100 mg/l, et que les Normes sont dépassées 75% du temps.
Installation de traitement.
L'eau brute provient de la retenue (barrage) de l'Arguenon d'une capacité de 11 500 000 m3 environ.
Schéma de principe de l' usine :


En fait, selon la période considérée, la filière varie dans ces étapes :

Plusieurs appareils de dénitratation (diam. = 3200mm) par échanges d'ions fonctionnent en parrallèle. La gestion de la permutation des échangeurs et de leur régénération est automatisée.
Seule une fraction du débit est traitée, la répartition des débits étant assurés par un système automatique : régulation d'un by-pass par une mesure de NO3 sur les eaux dénitratées et sur le mélange.

Une vue isométrique (face avant)

Exemple de composition des effluents.
Eaux brutes & traitées :

Caractéristiques

Eau brute

Eau traitée (mélange)

NO3, mg/l

100

24

SO4 , mg/l

40

8,4

Cl , mg/l

50

124,7

TAC , °F

5

3,8

 

Eluats d'une régénération (mélange éffluents concentrés et eaux de rinçage) :

Caractéristiques
kg
équivalents
g/l

NO3, mg/l

382,4

6168

7,09

SO4 , mg/l

161

3354

2,98

Cl , mg/l

325

9155

6,03

HCO3 , mg/l

73,7

1208

1,37

Na (1)

454,7

19770

8,43

Total

1396,8

39655

25,9

(1) Na de l'eau brute exclu.

 



Avantages et inconvénients des différents moyens de traitement :

Procédé
Avantages
Inconvénients
Biologique
  • rejets exempts de nitrates,
  • probabilité faible de formation de sous-produits toxiques,
  • spécifique des nitrates.
  • fiable seulement à une température > à 6-8°C,
  • surveillance suivie.
Résines échangeuses d'ions
  • fiable en toutes circonstances

  • adaptable à un fonctionnement automatique peu sensible aux basses, températures.

 

  • complexité du cycle CO2,
  • dépend de la qualité de l'eau brute : si SO4 trop élevée, et en Cl si cycle chlorures,
  • non spécifité des espèces retenues (SO2-, Cl-) ,
  • risque de relargage,
  • nécessité d'une régénération,
  • l'eau traitée peut être corrosive,
  • rejets très concentrés en nitrate.
Osmose inverse
  • procédé bien maîtrisé fiable en toutes circonstances,
  • peut fonctionner en automatique,
  • la composition de l'eau brute a peu d'importance.
  • modifie la qualité de l'eau initiale (l'eau traitée peut être corrosive),
  • non spécificité des espèces retenues,
  • nécessité un pré-traitement et quelquefois un post-traitement,
  • problème d'évacuation des éluats riches en nitrates,
  • durée de service des membranes.
Electrodialyse sélective
  • ne nécessite pas de régénération.
  • spécifité moyenne pour des rendements limités,
  • nécessité d'un pré-traitement,
  • présence de rejets concentrés.

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COUTS :
La comparaison des coûts est difficile car ceux-ci dépendent des conditions particulières à chaque station :

La comparaison doit donc tenir compte des débits et de la quantité de nitrates évacuée.

Si la littérature est abondante pour les aspects techniques des procédés, les études économiques comparatives sur les stations existantes sont plus rares.

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